Plusieurs travaux ont récemment souligné l'influence décisive du phénomène de mondialisation culturelle sur la création des artistes africains. En raison du manque d'autonomie du champ artistique, les principaux bailleurs de fond au Nord (qu'il s'agisse des organismes de coopération culturelle bilatérale ou des ONG) dicteraient les lois du marché, ne laissant qu'une marge de manœuvre limitée aux artistes. En outre, la relation entre créateurs et agents institutionnels – danseurs et directeurs des instituts français (Altaïr Despres, 2016), écrivains et agents culturels parisiens (Claire Ducournau, 2017) - constituerait un tremplin nécessaire à toute carrière artistique.
Dans le domaine du théâtre, les artistes se sont saisis du contexte de mondialisation culturelle pour impulser un renouvellement esthétique (John Conteh Morgan, 2010). La plupart des études soulignent l'originalité de l'œuvre de dramaturges qui ont bénéficié de possibilités nouvelles de mobilité. Leurs productions attesteraient d'une émancipation des préoccupations identitaires plus « locales » de leurs prédécesseurs (Sylvie Chalaye, 2004). Se faisant les chantres d'un « théâtre-monde », nombre d'auteurs comme Kossi Efoui ou Koffi Kwahulé revendiquent ainsi la portée universelle de leurs œuvres, permise par leur énonciation diasporique à la croisée des continents.
Si la mondialisation culturelle est pensée soit comme un facteur contraignant, soit comme un facteur stimulant pour les processus de création, il semble désormais admis qu'il est impossible pour un créateur qui aurait une ambition internationale de composer hors de ce cadre. Ce phénomène se manifeste donc nécessairement par l'homogénéisation de certaines normes esthétiques. En témoigne l'appropriation en Afrique chez certains artistes du critère d'originalité pour exister, véritable héritage du champ artistique occidental (Sarah Andrieu, 2017).
On peut donc légitimement se demander, au-delà des injonctions rattachées au paradigme de la globalisation culturelle, comment les dramaturges, metteurs en scène, comédiens qui créent localement parviennent à élaborer une esthétique propre et singulière sur les scènes d'Afrique. Quels sont leurs financements ? Quelle est la ou quelles sont les langues de création ? Vers quelles maisons d'éditions se tournent-ils? Comment ces éléments s'articulent-ils à leur esthétique? Existe-t-il des créations qui échappent aux discours dominant la scène artistique subventionnée ?
Les propositions de communication peuvent également aborder cette thématique au prisme d'autres arts vivants (musique, danse, conte...). Même si la bibliographie convoquée fait plus particulièrement référence à l'Afrique francophone, les contributions portant sur d'autres aires linguistiques sont fortement encouragées.
Andrieu Sarah, 2017, "Créer en solo, Individualisation des carrières et multiplication des écritures chorégraphiques de soi au Burkina Faso" dans: Créations artistiques et imaginaires de la globalisation, Sarah Andrieu et Emmanuelle Olivier (dir.), Hermann Editeur, Paris, pp. 303-327.
Chalaye Sylvie, 2004, Afrique noire et dramaturgies contemporaines : le syndrome Frankenstein, Montreuil-sous-Bois, éditions Théâtrales, Paris.
Conteh-Morgan, John, 2010, New Francophone African and Caribbean Theatres, Indiana University Press.
Despres Altaïr, 2016, Se faire contemporain, Publications de la Sorbonne, Paris.
Ducournau Claire, 2017, La fabrique des classiques africains, écrivains d'Afrique subsaharienne francophone, CNRS Editions, Paris.