La formation d'une zone économique intégrée, protégée de la concurrence extérieure et fondée sur la complémentarité des productions, passe dans certains cas par la création d'un espace monétaire commun. Cependant, les principes de la coopération monétaire dans la zone Franc sont remises en mises en cause aujourd'hui par un certain nombre d'économistes.
Depuis le début des années 90, une complémentarité s'est établie en Asie de l'Est par un jeu concomitant des processus d'intégration commerciale et de transition économique. Parallèlement à cette dynamique, on observe depuis 1995 l'intensification des échanges entre PED à un rythme soutenu et plus rapide que le commerce mondial. Le développement récent des relations entre l'Asie en développement et l'Afrique subsaharienne illustre parfaitement cette recomposition géographique du commerce mondial autour d'un commerce « Sud-Sud ».
En raison des schémas de commerce sous-jacents aux Chaînes de Valeurs Mondialisées (Global Value Chains), la Chine importe des produits pour être traités et réexportés vers le reste du monde. Or, une des conséquences majeures de cette division des tâches est de modifier les élasticités du commerce. Par exemple, alors que toute appréciation réelle du RMB avait pour conséquence d'augmenter les importations chinoises, des études récentes révèlent un effet inverse (Garcia-Herrero et Koivu, 2008). Si la littérature existante confirme en majorité une réduction des exportations à la suite d'une appréciation réelle du RMB, l'impact sur les importations est moins évident.
Dans le cadre d'une analyse comparative, nous nous proposons ici de mesurer les élasticités-prix des importations chinoises en fonction de ses partenaires africains (hors et dans la zone FCFA) vs l'Asie en développement:
- Premièrement, la macroéconomie internationale standard stipule que toute appréciation du taux de change réel réduit le surplus courant à condition que la condition de Marschall-Lerner soit vérifiée.
Or, une diversification à l'exportation des partenaires peut affecter la sensibilité des importations chinoises aux variations de change, infirmant la condition de Marschall-Lerner.
- Deuxièmement, une stratégie de résilience nécessite une politique de change combinée à des politiques commerciales.
Par leurs imbrications dans des réseaux complexes de sous-traitance, toute appréciation réelle du RMB réduit les exportations chinoises et, par emboîtement, celles de ses fournisseurs. Pour les PED participant à la chaîne d'approvisionnement de la Chine, une politique de taux de change unilatérale n'aurait donc pas d'incidence significative sur leurs exportations. En revanche, une politique commune du RMB et des monnaies nationales pourrait être plus pertinente.
- Troisièmement, le commerce inter-régional projette la théorie des "vols d'oies sauvages" décrivant le développement industriel en Asie.
Tout comme lorsque le Japon a déployé sa stratégie de délocalisation à la suite des accords de Plaza, une littérature exhaustive soutient l'idée que la fragmentation internationale de la production place la Chine au coeur d'une division du travail dans le monde en développement. De fait, la demande d'importation chinoise est devenue la force motrice des échanges Sud-Sud.
Nous arguons ici que la diversification à l'exportation des PED permet à la Chine d'accroître sa capacité de « résilience » aux mouvements de sa monnaie.