Extraction minière et développement en Afrique centrale : les leurres de l'investissement direct étranger.
Richard Makon Ma Mbeb  1@  
1 : Université de Yaoundé II

La mondialisation néolibérale semble propice à la rude concurrence que se livrent les Etats pour l'attraction des capitaux privés, et d'avantage les investissements directs étrangers (IDE). Si les pays développés s'en tirent plutôt bien en matière de flux entrants d'IDE, la concurrence y relative entre les Etats africains parait ravivée par la baisse enregistrée dans les flux en direction du continent. En effet, dans un contexte de récession économique due en partie à la chute vertigineuse, depuis le second semestre 2015, des prix des produits de base, les pays africains, aujourd'hui plus qu'hier, font de l'IDE un complément essentiel de financement de leurs économies.

Mais au-delà de la concurrence économique, davantage exprimée dans les politiques nationales d'incitations, ces Etats se livrent également une compétition juridique âpre, pour offrir aux investisseurs le marché national dans lequel la sécurité juridique des transactions, des actifs et des biens est la plus renforcée.

Toutefois, s'il semble indéniable que la sécurité juridique constitue une donnée fondamentale de l'essor de l'IDE, la convoitise des importantes ressources naturelles dont regorge l'Afrique constitue, à n'en point douter, l'un des premiers moteurs de l'attrait des investisseurs étrangers. L'un des secteurs économiques qui connait en Afrique centrale un intérêt marqué des investisseurs étrangers est celui de l'extraction minière.

Malheureusement, à l'analyse, la réalisation de nombreux investissements dans cette sous-région se fait au détriment des droits sociaux, de la protection de l'environnement, les manquements à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), entre autres. Par ailleurs, la plupart des mesures étatiques d'incitation à l'investissement dans le monde depuis 2014, nous fait remarquer la CNUCED, met davantage l'accent sur les objectifs économiques que sur le développement durable. Il convient de souligner que l'analyse de l'environnement de l'IDE donne aujourd'hui de constater la coexistence de trois (03) exigences au moins : d'abord celle de la nécessaire facilité d'investir et de désinvestir en toute sécurité ; ensuite celle de l'impérieuse prise en compte des préoccupations sociales, éthiques et environnementales ; enfin celle du besoin d'accomplissement efficace des missions de contrôle des Etats et de régulation mondiale.

Mais au constat, la forte poussée de l'investissement étranger dans le domaine de l'extraction minière et la vague d'espoir qu'elle a suscité auprès des populations de la sous-région, en l'occurrence celles riveraines de ces projets miniers, laisse progressivement place au désenchantement. Celui-ci est dû aux faibles retombées économiques au profit de ces populations, aux crises des dédommagements liées aux expropriations, aux dégradations parfois irréversibles de l'écosystème, entre autres.

La présente réflexion se propose de nous situer au cœur de la problématique de la dimension humaine, voire éthique tant de l'investissement international que de l'extraction minière. Elle permettra, par le recours à la sociologie du droit, de mettre en relief un double paradoxe, d'une part entre le désir d'investissement étranger des Etats de l'Afrique centrale et leur incapacité à en faire un instrument de développement économique, d'autre part entre développement de l'extraction minière et accroissement de la pauvreté des populations riveraines.


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