L'Afrofuturisme est une vision du futur et des réalités alternatives fondée sur l'héritage culturel du continent africain et de ses diasporas. Si le mot est avancé par Mark Dery en 1994 dans l'article “Black to the Future”, l'on fait remonter la vision afrofuturiste aux années 1970 avec, notamment, la musique du jazzman Africain-Américain Sun Ra (Space is the Place) dont l'imaginaire est nourri de futurisme. Pour Ytasha Womack, l'un des intérêts majeurs de l'Afrofuturisme est le travail sur l'imagination qu'il appelle, lequel favorise une auto-guérison (self healing) du sujet africain et afro-descendant. L'Afrofuturisme rejoint ainsi la pensée de l'En-commun qui traverse les écrits d'Achille Mbembe. Celle-ci postule l'inévitable de la Communauté dans toute réflexion sur le temps en Afrique, et tente d'en cerner le principe. L'exigence d'imaginer des devenirs possibles, futurs ou alternatifs, à l'Afrique (et dans lesquels l'Afrique est présente), et la nécessité pour l'homme africain de guérir des blessures subies au cours de l'Histoire et d'être restauré à lui-même, sont des points communs entre les deux pensées.
Chez Mbembe cette démarche doit aboutir à l'avènement d'une Communauté élargie, convaincu que “le temps de l'Afrique est inséparable du temps du monde”. Qu'en est-il de l'Afrofuturisme ? Quelle idée de la communauté renferme-t-il ? Afrofuturisme et pensée de l'En-commun se rejoignent-ils dans leurs visions de la communauté qui vient ou, au contraire, s'agit-il de deux conceptions différentes ? L'objectif de cette communication est, d'une part, de mettre en évidence l'idée de communauté contenue dans les propositions théoriques de l'Afrofuturisme, et, d'autre part, de voir le rapport qui peut être établi entre cette idée et celle qui transparaît dans les écrits d'Achille Mbembe. Il s'agit, en fin de compte, de s'interroger sur la place accordée aux questions liées au sujet et à la communauté dans les manières d'imaginer les futurs de l'Afrique.