La prise en charge du paludisme et ses effets sur le recueil de données : Le cas de Saint-Louis au Sénégal
Alice Furtado  1, 2@  
1 : LADYSS
Université Paris 8, Vincennes-Saint-Denis
2 : Université Paris 8
Université Paris VIII Vincennes-Saint Denis

Entre 2000 et 2015, dans le monde, l'incidence du paludisme a diminué de 37 % et la mortalité de 60%, selon l'OMS. Le Sénégal se distingue par une forte réduction de la maladie suite à la mise en circulation, en 2007, de Test de Diagnostic Rapide (TDR) gratuits dans les structures sanitaires publiques, dépendantes du ministère de la santé : moins 41% de cas entre 2008 et 2009 selon le Roll Back Malaria (RBM). Ainsi, en 2010, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a félicité le pays pour ses résultats. En 2016, le directeur du Programme Nationale de Lutte contre le Paludisme (PNLP) pronostiquait une élimination de la maladie en 2020.

Malgré une amélioration globale de l'accès aux soins dans le pays, des écarts demeurent entre les données relevées dans les structures sanitaires et les données notifiées au PNLP. Premièrement, la prise en charge dépend du type de structure et du matériel dont elle dispose, la gratuité n'est pas valable en dehors des structures sanitaires publiques. Deuxièmement, l'expérience du soignant (nombre d'années travaillées, structure fréquentée, conditions de travail au quotidien) tout comme son statut (agent de santé communautaire, infirmier, sage-femme ou médecin) peuvent influencer la pratique des soins ainsi que ses convictions au moment du diagnostic. Troisièmement, les protocoles de soins imposés par le ministère de la Santé ont été modifiés à la suite de la diminution du nombre de cas constatés sur l'année 2014 : par exemple, l'utilisation du TDR n'est plus systématique.

Cette communication s'articule autour d'un travail d'enquête réalisé auprès des différents types de structures sanitaires (postes dépendant du ministère de la Santé, structures militaires dépendant du ministère des Forces-Armées et cabinets médicaux privés) complété par des entretiens (habitants, membres d'associations et agents municipaux), dans une ville moyenne du Nord du Sénégal, Saint-Louis. Elle montre que ces disparités de prise en charge produisent indirectement une perte du nombre de cas de paludisme enregistrés. La diversité des pratiques des soignants, ainsi que la réduction du recours aux TDR en fonction des saisons pourraient marquer un frein dans la diminution du nombre de cas de paludisme, dans cette région du pays. Les données épidémiologiques recueillies par le ministère ne reflètent pas la réalité palustre de la ville. Cette discordance n'est pas évaluée et pourrait, à terme, créer un risque de résurgence du nombre de cas de paludisme à Saint-Louis.


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