Les paysages ruraux soudano sahéliens ont subi depuis près de quatre décennies les effets de la sécheresse. Cette forte variabilité climatique qui s'est traduite par l'amenuisement des cumuls pluviométriques et une importante occurrence des périodes de déficit pluviométrique, a fragilisé les systèmes agraires dans leur globalité. En Basse Casamance, cette instabilité pluviométrique a porté atteinte à la productivité générale des écosystèmes, bouleversant ainsi les pratiques et les modes de gestion. Dans cette région où l'agriculture et l'économie locale sont fortement dépendantes des précipitations et des ressources naturelles, la sécheresse a engendré de profondes mutations sociales et écologiques dont les conséquences les plus visibles sont l'exode rural et l'enfrichement des espaces ruraux. Cependant, avec le retour de la pluviométrie dans les années 2000, d'importants changements sont observés dans les paysages ruraux casaçais : apparition de nouvelles activités, changements de pratiques et de modes d'utilisation du sol. Ces nouveaux changements traduisent-ils dans ce contexte marqué par la déprise une stratégie de sécurisation du foncier? L'objectif de cette proposition de communication est de caractériser les processus et logiques à l'origine de reconfiguration des espaces ruraux. Pour mieux appréhender ces changements, le terroir villageois constitue l'échelle d'analyse la plus pertinente. Cet espace où la communauté agricole tire l'essentiel de ses ressources, est aussi un produit des structures sociales, des activités, des pratiques et des vécus. Cette étude se base sur une approche originale et innovante regroupant à la fois les méthodes de la morphologie mathématique et du traitement textométrique.
La morphologie mathématique regroupe l'ensemble des méthodes d'analyse permettant de décrire les formes sur les images à partir des concepts mathématiques. L'originalité de cette méthode réside avant tout dans sa capacité à extraire des informations sur images à très haute résolution spatiale (Google Earth) à partir des paramètres morphologiques tels que la taille, la forme des objets. Elle est utilisée ici pour cartographier cette portion du sol autour du village, où se localisent les champs et paît le petit bétail. Cette méthode a permis de réaliser des cartes d'occupation du sol combinant à la fois la couleur des sols et la taille des arbres, indispensables à l'analyse de la trajectoire des parcelles agricoles. A l'échelle du terroir villageois, la combinaison de ces deux éléments permet de mettre en évidence la manière dont le terroir évolue dans le temps en termes d'utilisation et de couverture du sol.
L'approche par la méthode textométrique permet de comprendre la logique des pratiques et des activités, la façon dont les changements d'utilisation et de couverture des sols sont perçus pour les habitants. À travers des procédures de tris et de calculs statistiques, l'approche met en évidence des mots ou expressions dont l'analyse individuelle ou contextuelle permet de saisir le sens profond des mots de mieux connaitre et de mieux comprendre l'organisation spatiale actuelle et les modes de vie.