Les formes de pouvoir dans la zaouia d'Illgh dans le Souss au Maroc.
Mohamed Es-Salih  1@  
1 : centre marocain des sciences sociales

Cette recherche porte sur une confrérie musulmane en contexte local, la zaouia d'Illgh au village de Dougadir. C'est une zaouia centre de l'ordre Derqaoui dans l'Anti-Atlas au sud du Maroc. L'étude est basée sur une enquête de terrain qui s'appuie sur l'observation participante comme technique ethnographique, traçant l'ensemble des interactions plutôt symboliques entre un cheikh, doté du charisme au sens Wébérien, et ses adeptes. Cette forme voulue et interactive constitue une dimension essentielle du pouvoir, de la domination, de la soumission et de l'obéissance.

L'interrogation qui dirige cette étude est la réflexion sur les formes du pouvoir au sein de cette association. La réflexion sur des comportements et types de relations sociales ou d'influence dites relations de pouvoir dans cette zaouia, d'où la question suivante : Comment penser la généralité des relations de pouvoir au sein d'une « Zaouia » ? Et par cette interrogation essayer d'analyser la construction sociale de la chefferie au Maroc.

L'observation ethnographique des pratiques rituelles des Derqaoua a permis de confirmer l'influence de la culture locale sur tous les rites de l'ordre soufi. Une adaptation des rites des Derqaoua à la culture berbère du Souss, tant des contenus des rituels que des représentations relatives à la soumission au Cheikh local de la zaouia. L'approche comparative entre la zaouia mère de Boubrih et celle du centre d'Illgh a permis d'identifier le degré d'adaptation des rituels avec la culture locale et la langue Tachelhit de la région du Souss.

Les adeptes de la Derqaouia, moins portés sur les préoccupations sociétales et politiques du Maroc, manifestent un fort attachement aux rites et aux liens spirituels avec le cheikh local. Les Foqara en quête d'ouverture spirituelle se réfèrent au modèle du Cheikh Al-Haj Ali Derqaoui, le fondateur de la Zaouia d'Illgh. Le choix des rites est porté sur certaines pratiques : le Moussem annuel, les veillées religieuses, la pérégrination religieuse, la remémoration (dhikr), la retraite cellulaire (khalwa), le repas rituel (Maârouf).

La thèse de Abdallah Hammoudi dans son livre « le maître et le disciple » montre bien, à partir d'une étude de deux ordres soufis marocains la Naciria et la Derqaouia, comment la relation entre le maître et le disciple dans la zaouia est strictement la base culturelle de la relation entre les chefs politiques et leurs élites dans les pays arabes. L'étude que je mène s'accorde avec cette thèse de Hammoudi puisque plusieurs pratiques religieuses dans la zaouia étudiée renforcent les bases et les fondements religieuses de la monarchie marocaine : le baisemain, la soumission, la prosternation, la vénération des saints,...etc

Les enjeux liés à la promotion du soufisme au Maroc sont multiples : contrecarrer l'Islam politique, dépolitiser les citoyens et diffuser un Islam modéré et tolérant. Historiquement les rois du Maroc ont toujours établi des liens avec les chefs des zaouia, ces relations sont parfois tendues, parfois de bonne entente. Aujourd'hui le roi Mohamed 6 réactive le soufisme marocain, encourage les festivals soufis, désigne les cheikhs des ordres, octrois des offrandes, finance certaines activités soufies et les Moussem de certaines zaouia.


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